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jpmineur
8 mars 2009

Hi-Tech

Hi Tech.

Il faisait beau, ce jour là, très beau. Une journée de mars, méditerranéenne, ensoleillée et chaude que l’on savoure langoureusement, les crocus, iris et anthémis offraient, grands ouverts, leur pollen aux premières abeilles. Un très léger vent frais soufflait de l’ouest.

Je lézardais mollement sur ma terrasse, soigneusement protégé de la fine tramontane, une tasse de thé à la main, vautré sur un vieux fauteuil en rotin, quand je l’ai vu arriver, par l’ouest, comme poussé par le vent. Chaussures de sport imitation cuir à lacets, pantalon de toile vert  et blanc, veste assortie ouverte sur un ventre rebondi et gilet jaune fluo. La tenue classique des employés des services techniques municipaux de notre bonne ville de Palavas les flots.

Notre homme poussait, lentement, sans effort apparent, un chariot composé de deux roues, d’un bâti de métal vert, prolongé d’une poignée de plastique blanc et à l’autre extrémité un cercle supportant un immense sac poubelle transparent et totalement vide. Sur le coté de l’engin, deux tiges de métal font office de râtelier aux outils indispensables à la tache de notre homme vagabond : une pelle au manche de bois patiné et au fer usé, et un balai en résine vert   flambant neuf.

Il avançait d’une lenteur rare, comme ces gamins qui traversent devant votre voiture, large sourire aux lèvres, alors que le feu vient de passer au vert.

Jetant un coup d’œil à droite, au sud, vers la plage encore vide de touristes bruyants, un voilier au loin vogue vers l’horizon.  Puis à gauche, au nord, ou les flamants roses et immobiles broutent inlassablement, le cul en l’air, la tête plongée dans l’eau stagnante de l’étang du Grec. D’un coup, sans crier gare, sans raison apparente, il s’est arrêté net, a fait un quart de tour plein sud, a grimpé son véhicule sur le trottoir d’autobloquants gris. J’ai pensé un instant à un papier gras et disgracieux qui d’un mouvement précis, deviendrait la première proie du sac auto-porté et toujours vide, mais non, aucun geste de la sorte.

L’homme me tourne le dos, maintenant, et je peux alors lire sur le gilet jaune, en lettres noires, la devise de notre individu : PALAVAS VILLE PROPRE.  Brave homme !

J’entends comme une voix, semblant provenir de l’homme machine. Parlerait-il tout seul ? Appellerait-il la canette de bière vide, comme la fermière appelle ses poules ? Petit, petit, petit ! La phrase, bien qu’incompréhensible à cette distance, semble humaine et cohérente. La voix et puissante, comme celle des gens qui parlent peu, je perçois clairement quelques mots dans ma langue maternelle, me parlerait-il à moi ? De dos !

Le technicien municipal de surface déguisé en martien labellisé pivote doucement autour de sa monture, et je comprends enfin. Dans son oreille droite, jusqu’alors invisible, fermement enfoncé, un petit écouteur miniaturisé d’où sort un fil noir muni au niveau de la gorge, d’un mini microphone. 

Un kit main libre !!!

Fourni par la Mairie ? J’espère de tout cœur que mes impôts ne servent pas à payer ce genre de connerie.   

Incroyable ! Ce type pilote une poubelle à roulette dans les rues désertes et propres de Palavas et utilise un kit main libre pour ses communications téléphoniques.

La conversation cesse, notre chasseur de détritus descend de son trottoir et part, d’un pas de sénateur, vers le levant, où l’attendent, on l’espère, des prises miraculeuses et d’autres communications Hi-tech.

Je vais remplir ma tasse vide…

J.P. Mineur.

Palavas les flots, mars 2009.

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